Etat d'urgence
Eh bien voilà ! Nous y sommes. Comme un homme ivre qu’on réveille en l’aspergeant d’eau glacé, le pays comprend ce soir où l’a mené sa marche de somnambule.
Il aura fallu 129 morts pour que soit enfin pris un décret permettant, en Ile de France seulement, que soient assignés à résidence les individus qui représentent de toute évidence, mais pas pour certains juges enclins à la modération, un danger mortel pour les bons citoyens.
129 morts pour que nos services de sécurité fassent enfin autre chose que de remplir des fiches que personne ne lit.
129 morts pour que nous reprenions la maîtrise de nos frontières, ce qui était prétendument impossible il y a quelques semaines encore.
La France paye du sang de ses enfants innocents ses années d’errance, des années de haine de soi, de lâcheté face au communautarisme, des années d’irénisme et de paresse. Souvenons-nous que quelques mois à peine se sont écoulés depuis que le livre ignoble de M. Todd a fait la couverture des périodiques. Livre inouïe ! Son compendium d’élucubrations, son ragout de vielles cartes, de vielles histoires et de préjugés, ses catholiques zombies et autres objets de pseudoscience qu’on ne peut observer que dans son cerveau pervers. Œuvre mémorable n’ayant pour but que de prouver une fois de plus qu’une pipe n’est pas une pipe, que les assassins de janvier n’étaient que des victimes de l’exclusion, que les victimes des attentats étaient les complices des coupables de grands crimes, racisme, refus de l’autre, intolérance aux cultures allogènes, xénophobie.
Au moins, cette fois-ci, les nouvelles crapules dont les corps devraient rejoindre les égouts de l’histoire se sont-elles attaquées au cœur et non à la périphérie. Car nul ne peut aujourd’hui se prétendre non-juif, non-policier, non-Charlie. Tout homme au contraire peut se comprendre comme le frère, le père ou le fils, de ceux qui ont été assassinés alors qu’ils dinaient avec leurs amis dans un restaurant du vieux Paris avec leurs amis, ou qu’ils assistaient à un concert dans une salle mythique que tout parisien a fréquenté au moins une fois dans sa vie. Maintenant, c’est le cœur même de notre mode d’être, de notre convivialité, de notre façon de vivre en société d’hommes et de femmes mêlés qui est attaqué et nié.
Car comme par hasard, comme à Alger il y a 55 ans, les cibles sont les cafés, le sport, la danse, la musique ; tout ce qui embellit la vie, tout ce qui est pour nous la vie, les endroits où l’on s’aime, où l’on est heureux ensemble.
Alors finissons-en une fois pour toutes avec les pulsions de mort, les génuflexions, les compromissions, l’utopie qui est bien la pire des maladies en politique. Et finissons-en avec les prières, le pacifisme actif, la volonté d’impuissance et tous les autres synonymes de la lâcheté.
Sus à l’ennemi !