le retour du service militaire

Publié le par Jean Dampierre

le retour du service militaire

Un article d’une rare stupidité de la revue en ligne Slate.fr attire notre attention sur la proposition de rétablissement du service national par le parti socialiste, et il faut le saluer pour remettre dans le débat cette idée qui ne fait pas l’unanimité. Certains à droite sont contre (François Fillon en particulier), d’autres pour (Eric Ciotti, François Bayrou…), et il en va de même à gauche avec messieurs Montebourg et Mélenchon dans le camp des « pour », alors que le ministre des jeunes est dans le camp opposé.  Le service national qui serait essentiellement un service civique concernerait toute une classe d’âge et comporterait un volet militaire. C’est de ce dernier dont nous allons parler.

 

Le service militaire formait des soldats

D’abord il est de bon ton (c’est l’article de slate.fr) de dire que le service militaire ne servait à rien, et surtout pas à produire des soldats. C’est un propos qui est souvent tenu par des gens qui en parlent par ouï-dire. Historiquement, c’est assez faux. Ceux de14, pour reprendre l’expression de Maurice Genevoix, ont été formés par le Service militaire, ceux de 39 (dont Guingouin et Bigeard) ont été formés par le service militaire, et il en fut de même pour ceux qui firent la guerre d’Algérie. Je connais quelques vignerons et quelques paysans des alpes qui sont allés servir en Algérie, n’allez pas leur expliquer qu’ils n’étaient pas des soldats…  Plus près de nous, et de ma propre expérience, j’ai vu des appelés conduire des chars, tirer au canon ou au fusil, sauter en parachute, faire le parcours du combattant, monter des assauts, défiler impeccablement (un général m’a dit à Coetquidan, Bretagne : « je ne pensais pas qu’il pût y avoir une telle unité entre EOA et EOR), mettre en œuvre des moyens de transmission, faire des stages commando, passer des brevets civils ou militaires… certains trouvaient aussi le temps d’éplucher quelques patates mais ce n’était pas l’activité principale.  Fort heureusement nous n’avons pas eu de conflit majeur depuis 50 ans, mais je n’ai nul doute sur le fait que les appelés du contingent mobilisés à cette occasion se seraient comportés comme leurs grands-pères et leurs pères. Ils auraient tenu leur place, comme le vieux Socrate lui-même, qui pas plus que ses camarades de combat n'était un militaire de carrière et dont la vaillance à la bataille de Délion fut louée par le général Lachès lui-même, comme les soldats de l’An II qui ont vaincu les armées de mercenaires de l'Europe coalisée contre la République.

 

Ce qui n’est plus possible

Que le Journaliste de Slate se rassure, les « pioupious » selon son expression, ne passeront pas leur temps à balayer les cours des casernes, elles ont été vendues. Depuis la décision de Jacques Chirac, beaucoup de régiments ont été supprimés, beaucoup de structures démantelées, beaucoup de bâtiments vendus.

La reconstitution du Service Militaire à l’identique de ce qu’il était il y a 25 ans, est impossible et elle n’est d’ailleurs pas souhaitable. On parle de 800 000 personnes sur 6 mois, donc de 400 000 en même temps. La formation militaire c’est 2 (c’est le temps de former un marine) à 4 mois (les classes d’un Para ou d’un EOR), prenons deux mois. Il faudrait donc loger au minimum 1/6 des effectifs.

De quel effectif a-t-on besoin et pour quoi faire ? Ceux qui voient les légionnaires et des paras déambuler dans nos villes en ce moment, c’est-à-dire tout le monde, peuvent répondre à cette question : pour faire ça ! Ce qui nous permettrait de récupérer nos troupes d »élite pour leurs vraies missions. De façon générale, compte tenu des tensions du monde actuel, il nous faut une garde nationale assurant la sécurité militaire de proximité. Il faut environ 10 000 militaires opérationnels, ce qui avec les roulements fait 40 000. Compte tenu des deux mois de formation il y aurait donc 60 000 hommes sous les drapeaux dont 20 000 (10 000 par mois) logés et en formation (deux divisions ce qui est possible) et 40 000 chez eux intervenants la journée ou la nuit. Les 340 000 autres faisant un service civil ou renforçant efficacement les effectifs de la police. Chaque année, 120 000 hommes seraient donc formé au combat.

Dans quel but

Rétablir le service national c’est non seulement rétablir le service militaire pour lutter contre le terrorisme, mais c’est aussi disposer d’une réserve facilement mobilisable de 600 000 hommes disposant d’une instruction militaire les rendant aptes au combat en cas de de problème majeur.

Au surplus, chacun sait, chacun de ceux qui en ont eu une expérience directe, sait que le service national est un outil de brassage, tant social, intellectuel, qu’ethnique, un outil de construction d’une identité commune de premier ordre. Seuls les aveugles sont insensibles au fait que la montée des communautarismes fut concomitante avec le déclin du service national et leur explosion avec sa destruction.

Souvenons-nous aussi que la démocratie est née précisément avec la phalange, avec l’armée des hoplites, l’armée du peuple. Dans la phalange hoplitique, tous les hommes sont égaux, le bouclier de mon voisin de droite me protège, je protège de mon bouclier, mon voisin de gauche, les hommes avancent ensemble, épaule contre épaule, lances en avant, marchant ou courant du même pas. La phalange hoplitique est mère de l’isonomie, elle est la fin du héros homérique qui s'avance seul pour vider les querelles en combat singulier et la mort des des oligarchies qui sont incapables de mobiliser plus d’un bataillon.

L’armée du peuple, c’est l’isonomie, l’isonomie c’est la démocratie.

 

 

 

 

http://www.slate.fr/story/129947/le-service-militaire-cette-machine-fantasmes

http://www.sudouest.fr/2016/12/01/le-ps-veut-retablir-le-service-militaire-une-decision-qui-ne-fait-pas-l-unanimite-2587103-710.php

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