SentiNulle

Publié le par Jean Dampierre

 

Voici 30 mois que de charmants petits groupes de militaires déploient leurs mouvements gracieux dans les rues de nos villes. Depuis que trois lémuriens ont massacré la rédaction d’un journal satyrique et se sont livré aux plus vils des assassinats dans une épicerie cacher, nos gouvernements successifs et la politique du spectacle qu’ils incarnent considèrent qu’il est de leur devoir de calmer le peuple en transformant ainsi l’armée en corps de ballet et en lui faisant réaliser ce gigantesque happening.

Quel résultat remarquable ! il ne se passe pas un mois sans que nos danseurs folkloriques de boucliers qu’ils sont supposés être, ne deviennent cibles. Quoi de plus simple en effet que de foncer à bord d’un véhicule civile dans un groupe de militaires en uniformes parfaitement identifiables au moment où ceux-ci, revenant de deux heures de promenades s’y attendent le moins.

Car ces déambulations, le fusil non engagé, n’ont jamais été un exercice militaire. Il est même impossible qu’elles le soient, sans quoi, mettre 10 000 hommes dans les rues pendant 30 mois n’eût pu se faire sans bavure. Elles ne peuvent être qu’une parade interminable et ridicule.  10 000 hommes, c’est l’équivalent d’une division. Notre petite armée n’en compte pas tant que cela. Une garde nationale eut été toute désignée pour ce genre d’exercice. Mais nous n’en avons pas. Alors on compose comme on peut. Parfois ce sont des paras ou des légionnaires qui rongent leur frein. Parfois ce sont des cuisiniers ou des mécaniciens qui se demandent ce qu’ils font là et qui seraient bien en peine de se servir de leur fusil d’assaut s’ils étaient pris à parti.

Et pour réaliser cette magnifique opération le comble est qu’il a fallu en arrêter d’autres et se désengager à la hâte de la république de Centre Afrique où notre armée maintenait un équilibre fragile. Il a fallu le laisser ce pays, où nous avons tout de même quelque devoir moral, au bord de la guerre civile, à la garde de quelques casques bleus incompétents, sous-entraînés, sous-encadrés,  composés de contingents de pays n’ayant pas d’armée digne de ce nom, Népal, Bangladesh ou autres, et qui s’égaieront comme des moineaux si les choses tournent mal. Car si les milices décident là-bas de passer à l’action, ce n’est pas un corps de balais qui les arrêtera, c’est une véritable armée, de véritables soldats, ceux-là même qu’on a transformé en cibles dans nos rues.

Mettre un terme à cette opération inutile, coûteuse et dangereuse est une évidence. Le gouvernement hollandais était lié par ses décisions passées et on peut comprendre qu’il l’ait prolongée, sans pour autant partager ses raisons, mais que penser de ces marcheurs en rond qui ont dit simplement « on verra ça après les vacances ». ils avaient mieux à faire, semble-t-til : couper dans le budget militaire d’un côté, confier la moralisation de la vie politique à un aigrefin de l’autre ou bien encore repenser les fondements de la République, comme la définition du rôle de la « première dame de France », concept vague, ambiguë, qui eût déclenché l’hilarité ou la colère chez les gaullistes s’il en avait encore existé.  

Qu’un soldat français soit tué de temps à autre, un représentant de l’immense cohorte de « ceux qui ne sont rien », n’a pas de quoi troubler les vacances bien mérité de l’idole des marcheurs.

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